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DOSSIER Assistants vocaux – PART. 2/2 | LA VOIX N’A PAS DIT SON DERNIER MOT

Assistants-vocaux
Dounia Issaa 4 min de lecture 1.5k vues

Dans le cadre de notre dernier numéro de Transat #8, le magazine d’inspiration de récompenses et cadeaux d’affaires, nous décryptions le phénomène des assistants vocaux qui bouleversent les codes de la communication traditionnelle. Voici la dernière partie de ce dossier.

COMMENT LES MARQUES PEUVENT TROUVER LEURS « VOIX » avec les assistants vocaux ?

Si les promesses du vocal sont séduisantes, les marques connaîtront le succès seulement et seulement si elles adoptent une nouvelle approche, en cherchant à apporter une réelle valeur ajoutée par rapport aux autres canaux existants. « En effet, il est important de ne pas faire de son app vocale un gadget qui viendrait finalement polluer l’expérience du client, comme beaucoup trop de chatbots l’ont été. Pour faire du vocal, l’enjeu véritable est alors d’identifier des […] problématiques qui n’ont jamais été résolues avec les canaux existants. Si on peut les résoudre efficacement par le vocal, alors la marque peut se lancer ! » précise Geoffrey Boulakia.

En complément, les marques doivent inscrire ce canal au coeur de leur stratégie de communication, autrement dit elles doivent commencer par avoir une véritable identité de marque pour assurer une cohérence entre les canaux et éviter la rupture dans l’expérience. Quelle tonalité ? Quelle ligne éditoriale ? Quels sujets ? Quelle voix et quelle intonation ? Quel registre sémantique ? etc. sont autant de questions à soulever pour réussir sa présence de marque sans visuel.

« Au quotidien, l’usage sera sûrement de commander la commodité et non la marque : ”Ok Google, j’aimerais acheter des piles” et non “des piles de marque X”. Les marques seront donc obligées de soigner leur identité verbale et orale : le choix des mots et la façon de les prononcer. Le pari sera gagné si on attribue avec autant de facilité la voix d’une marque que son logo, sa signature, ses produits iconiques. » souligne Tanguy Riou, directeur du planning stratégique de Lonsdale.

Une réflexion vertueuse que Monoprix a appliqué : son assistant vocal utilise en effet le même langage que l’enseigne, réputée pour ses célèbres jeux de mots. Parmi les exemples les plus célèbres, lorsque l’on demande à l’assistant Monoprix d’ajouter des sardines dans la liste de course, il ne peut s’empêcher de répondre “c’est dans la boîte !” Même chose chez Auchan qui a préempté un domaine et un champ sémantique précis (le vin), en développant un conseiller vocal pour accompagner le meilleur accord mets et vins.

En complément, les marques doivent avoir une approche multimodale qui intègre le vocal comme une étape du parcours client, avec une véritable complémentarité entre on et offline et un contenu engageant, décorrélé de l’aspect transactionnel pur. La voix impose en effet un nouveau rapport aux marques, plus humain et plus authentique. General Electric l’a bien compris : son podcast The Message, rassemble plus d’un million d’auditeurs, autour d’une série de 8 épisodes qui parlent de technologie sans chercher à vendre l’entreprise.

Quant aux assistants vocaux, ils doivent, dans le secteur du Retail, être un complément au site e-commerce et à la boutique physique, afin de générer du trafic et des ventes additionnelles. Mais dans tous les cas, que l’on investisse ou non dans une interface vocale, il faut repenser l’ergonomie et le SEO des sites afin de trouver le meilleur équilibre entre le clavier, le tactile et la voix. Au même titre qu’il a fallu s’adapter au mobile (et à son écran vertical et son scroll infini), il faudra aussi s’adapter à la voix car de nombreuses personnes utiliseront ce canal pour exprimer leurs requêtes.

« Le développement de l’usage de la voix a pour conséquence un rallongement des requêtes effectuées sur les moteurs de recherche, celles-ci ressemblent alors de plus en plus à des phrases du quotidien plutôt qu’à une suite de mots-clés. Articles de blog, FAQ… L’ensemble des éléments rédactionnels des sites web doivent donc être repensés de façon à répondre à des questions plutôt qu’à chercher à faire coïncider plusieurs mots-clés ».

Franck Negro, Directeur Europe du Sud de Yext

Enfin, les marques devront plus que jamais maîtriser la collecte et l’analyse de la data et de l’IA (Intelligence Artificielle). Car pour être réellement pertinente, la voix devra être en mesure de converser avec chaque utilisateur, de façon précise, personnalisée et en temps réel. La connaissance clients et donc la capacité de la marque à alimenter un dialogue à la fois distinctif et proche feront toute la différence sur la durée… sous réserve que la vie privée des utilisateurs soit respectée.

LES LIMITES DU VOCAL : QUAND LA PAROLE S’ENVOLE

En se retrouvant au cœur du foyer, les assistants vocaux se connectent à notre vie privée. En veille permanente, l’enceinte connectée peut en effet s’activer et enregistrer inopinément une conversation dès lors qu’elle croit entendre le mot clé de l’activation (« Ok Google »). Cela a fait l’objet de récents scandales envers les trois leaders du marché (Apple, Amazon, Google) qui ont reçu des condamnations pour avoir écouté et enregistré des conversations privées. Les trois GAFA s’en défendent en assurant que ces écoutes sont minimes (1% des interactions) et qu’elles leur permettent d’aider leur AI à mieux comprendre les requêtes, avant d’être effacées.

Il n’empêche qu’avec Internet, les utilisateurs ne sont plus dupes et les marques devront redoubler d’efforts pour regagner leur confiance et faire preuve de transparence dans la gestion des données. Une autre limite des assistants vocaux réside dans l’exactitude des informations et réponses données. D’après l’étude de la société Yext sur la voix, moins d’1/3 des Français font confiance à la recherche vocale pour prendre une décision et 21% d’entre eux estiment devoir revérifier l’information en ligne. Il reste encore quelques freins que la technologie doit résoudre comme les accents, les requêtes inédites, les expressions, le contexte…

Tous ces éléments devront être pris en compte et analysés afin de donner à la voix toute sa pertinence. « Nous avons observé plus de 5 000 variations pour la simple demande de mettre une alarme », observe Loïc de Saint Andrieu, Mobile Evangelist chez Google France. « L’acte d’achat par la voix a encore du chemin à parcourir avant de devenir une habitude. Il est vital pour les marques et les entreprises d’être au fait des nouvelles habitudes des consommateurs et notamment de veiller à la véracité des informations disponibles. Aujourd’hui, c’est un facteur capital pour gagner la confiance du consommateur afin de transformer une recherche en acte d’achat » ajoute Franck Negro, Directeur Général, Europe du Sud de Yext. Enfin, l’offre de service devra elle aussi évoluer pour proposer à l’utilisateur une expérience réellement immersive et sans couture… jusqu’au point de créer
une véritable conversation sur la durée.

VERS UNE ROBOTISATION DES RELATIONS HUMAINES ?

Malgré l’engouement autour de ces assistants vocaux, de nombreux spécialistes nous alertent sur les risques d’une robotisation des relations humaines. Nous avons tous en tête le père de famille qui, dans une tribune, exprimait son inquiétude envers sa fille qui oubliait totalement les codes des relations sociales, en échangeant avec ces plateformes. Disponible 7 jours sur 7, Siri, Google ou Alexa ne se plaignent jamais et répondent toujours sans attendre de « s’il te plaît » ou « merci ».

Certains auteurs et spécialistes en neurosciences cognitives vont même jusqu’à alerter sur les risques de ce « multitasking » et de cette « hyperconnexion » qui nous rendent moins attentifs aux autres et donc moins ouverts aux échanges réels. Par ailleurs, la conversation semble aujourd’hui encore trop limitée et souvent à sens unique. On est bien loin du film « HER » de Spike Jonze, mais fort heureusement la technologie s’adapte, apprend et s’améliore, grâce à l’Homme. Car le succès du vocal réside justement dans cette complémentarité Homme-Machine, seule condition pour enrichir l’expérience et créer une conversation réellement humaine.

Boursorama est un bon exemple : pour adapter son assistant vocal au monde de la banque, l’entreprise n’a pas hésité à entraîner ses algorithmes pour progresser dans cette compréhension nuancée des différentes demandes. De son côté, Amazon a décidé de mettre à contribution ses équipes et ses utilisateurs afin de les aider à faire progresser son assistant vocal, Alexa. La société a développé une plateforme collaborative, Alexa Answers, pour permettre aux utilisateurs de soumettre leurs propres réponses aux requêtes des internautes.

En résumé, le vocal constitue un levier stratégique dans la relation client-marque, générant plus d’impact, de mémorisation, d’engagement et donc de business. Un levier qui impose toutefois de repenser le rôle des entreprises dans une approche plus servicielle, en faisant converger tous les canaux pour optimiser les parcours et les expériences. L’avenir appartiendra donc aux marques qui se doteront d’une voix. Une voix unique, mémorable et authentique… qui mérite d’être écoutée !

>> Pour découvrir la première partie de ce dossier rendez-vous ici.

>> Et pour lire l’intégralité du magazine Transat 8 c’est par ici !

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L'auteur - Dounia Issaa

Dounia est Directrice Communication chez Loyalty Company.

"Mon ambition ? Produire des contenus utiles qui fassent sens et alimentent vos réflexions. Ce qui me motive ? Vous inspirer, vous interpeller, vous faire réagir !"

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