Challenge commercial : pilotez le suivi de votre opération
Nul doute aujourd’hui : une opération de motivation commerciale présente...
Dans le cadre de notre dernier numéro de Transat #7, le magazine d’inspiration de récompenses et cadeaux d’affaires, nous décryptions le phénomène du neuromarketing. Voici la première partie de ce dossier, rendez-vous la semaine prochaine pour la deuxième et dernière partie !
Face à l’abondance de messages relayés par une grande diversité de médias, le neuromarketing se propose de sonder les replis de nos cerveaux pour mieux activer les émotions et les désirs susceptibles de nous faire acheter. Si le principe pose naturellement quelques questions éthiques, le phénomène n’est pas nouveau. Faut-il s’inquiéter de ces menaces potentielles sur notre liberté individuelle ou éduquer notre cerveau pour savoir prendre ses propres décisions ? Lumière sur ce phénomène de société…
« Plusieurs laboratoires de recherche dans le domaine des sciences du cerveau se voient désormais sollicités par l’industrie afin de contribuer au développement de méthodes marketing » écrivait en 2003 Olivier Oullier, chercheur en neurosciences, dans une tribune Le Monde.
Dès le début des années 2000 aux Etats-Unis, le neuromarketing se proposait d’utiliser les neurosciences cognitives pour maîtriser le processus de nos décisions d’achat, depuis l’élaboration des messages publicitaires jusqu’à la mise en scène des lieux de vente, physiques puis digitaux.
Mais de quoi s’agit-il au juste ? Dans une définition stricte, le neuromarketing vise à comprendre et anticiper nos comportements d’acheteurs, grâce à la mise en évidence des mécanismes cérébraux qui interviennent lors de nos décisions ou face à un message publicitaire. L’idée est de mettre en œuvre les bons stimuli pour recréer les réactions émotionnelles nous conduisant à l’acte d’achat. Parmi les outils utilisés, des IRM, des électroencéphalogrammes ou encore l’eye-tracking. La méthode consiste à observer comment ce dernier choisit les produits ou comment il perçoit les messages, grâce à des lunettes reliées à des capteurs cérébraux. En repérant les éléments les plus efficaces sur une page Internet ou dans un point de vente, les marques savent désormais nous prendre par la main, jusqu’à la validation de notre panier.
Pourquoi recourir à de telles technologies ? Tout simplement, parce que, face à des enjeux colossaux, les acteurs du marketing s’interdisent le droit à l’erreur. Tout va très vite et les parts de marché se conquièrent par la rapidité et le « frapper juste ». Or, les études fondées sur le déclaratif ont montré leurs limites : 80 à 90 % des produits lancés sur le marché, échouent la première année, en dépit d’études coûteuses. Il y aurait donc un fossé entre ce que nous disons et ce que nous faisons. Si les marketeurs veulent traquer à notre insu nos émotions, c’est pour pallier cette logique de l’à-peu-près. Ainsi, le neuro-marketing éviterait aux marques des pertes importantes et accélérerait leur performance économique. Mais cette volonté de nous conditionner (certains diront de nous manipuler) n’est pas nouvelle.
Nous inciter à acheter en créant les conditions propices est un phénomène bien connu et très ancien. Les pionniers sont les premiers grands magasins dès le XIXème siècle : éclairage, musique, mise en scène et même parfums enchantaient déjà les cinq sens des visiteurs pour les inciter à dépenser. Aujourd’hui, le marketing sensoriel est devenu la pierre angulaire de l’expérience client, certains lieux de vente se transformant en de véritables lieux de vie. Dans certains cas, le consommateur peut sortir gagnant de cette course à la séduction.
Par exemple, il est désormais possible de retourner gratuitement un produit qui ne nous convient plus ou de tester dans un véritable salon reconstitué, le canapé qui nous accompagnera plusieurs années de notre vie. La réalité augmentée ou la réalité virtuelle ont fait reculer les limites, permettant d’être immergé dans un champ de lavandes en pleine métropole, de consulter un catalogue de jouets en 3D, ou de tester une nouvelle voiture sans quitter son fauteuil. Autant d’expériences immersives, mêlant images réelles et virtuelles, qui sans qu’on le sache, sont souvent associées à de la récupération de données, notamment de géolocalisation, pour générer par la suite des publicités ciblées. Le design persuasif se propage d’autant mieux depuis la généralisation des outils numériques qui ont rapidement créé une dépendance vis-à-vis des applications et des réseaux sociaux.
Axés sur la gamification du quotidien, ils exercent sur nous une fascination dont nous ne mesurons pas toujours l’importance. C’est le principe de l’addiction qui est, par définition, contraire à l’exercice du libre arbitre. Nous avons tous perçu l’e-commerce comme le symbole de la liberté absolue en matière de shopping, parce qu’il abolit les barrières du temps et de l’espace. A quoi s’ajoute l’illusion de l’anonymat et même celle d’une absence de pression commerciale, puisqu’on est seul(e) face à son écran. Seul(e)? Pas vraiment. L’e-commerce est le terrain de jeu idéal du neuromarketing, précisément parce que l’acheteur se croit davantage maître de ses décisions qu’en point de vente. En fait, nous sommes en permanence tracés pour ne pas dire traqués. Et c’est bien sûr à notre cerveau droit, moins rationnel, que les webmarketeurs, avec l’aide des spécialistes de l’ergonomie du web, s’adressent. L’objectif ? Combiner subtilement contenus alléchants et design efficace pour tirer tout le parti de ces transactions dématérialisées.
Le rôle de la publicité a toujours été d’influencer par les bons arguments (dimension rationnelle) et le choix des codes couleurs, des bons visuels ou d’une musique appropriée (dimension émotionnelle). En cela, le neuromarketing innove surtout par les ressorts qu’il active. Pour Patrick Renvoisé, Président de l’agence SalesBrain, un bouton « achat » se situerait au plus profond de notre cerveau, dans la zone « reptilienne » ou primitive qui est directement reliée à nos instincts, court-circuitant notre rationalité. C’est sur ce cerveau-là, chargé de la satisfaction immédiate de nos désirs, que les neuromarketeurs doivent agir pour parvenir à leurs fins, en nous activant en mode « impulsion », sans vraiment nous laisser le temps de réfléchir.
« Tous les grands groupes utilisent les techniques de neuromarketing : Coca Cola, Nike, Procter, Mc Donald’s… C’est une évolution normale pour un service de marketing moderne ! »
D’après Michel Badoc, professeur de Marketing à HEC
Mais il est difficile de définir où se situe la limite éthique entre influence et manipulation ? Lorsque l’entreprise e-Bay teste auprès de ses clients l’argument le plus convaincant entre rapidité et sécurité du service, la rapidité l’emporte. Elle va donc exploiter ce levier mais si le service est sécurisé par ailleurs, il n’y a pas de vrai problème. En revanche, lorsque Mac Donald’s teste sous IRM des odeurs afin de déterminer laquelle évoque le mieux une nourriture saine et l’introduit dans ses produits, à l’insu de sa clientèle, elle améliore la perception de la marque sans amélioration du produit. Il y a non seulement manipulation, mais tromperie sur la marchandise.
Le Docteur Tali Sharot, professeur en sciences cognitives du département de psychologie expérimentale de l’University College de Londres, a analysé de son côté les mécanismes de l’influence. Elle explique « qu’il suffirait de bien connaître nos biais inconscients et notre subjectivité » et de les utiliser en vue de réduire notre recours à la rationalité. C’est la raison pour laquelle les marques vont nous inciter à nous dévoiler : sous prétexte de nous demander notre avis, telle enseigne de cosmétiques va récolter, sans contrainte apparente, des informations sur notre qualité de peau pour nous relancer de manière personnalisée. De même, nos frustrations et nos angoisses nous rendent réactifs aux approches ludiques sous forme de jeux-concours ou de tests, qui flattent notre cerveau droit, en mettant en sommeil notre cerveau gauche, plus critique et plus rationnel.
Le Docteur Tali Sharot s’est également demandé pourquoi nous accordions notre confiance à un like sur Facebook ou un commentaire positif sur LinkedIn. Cette sensibilité aux avis de notre communauté serait dû à notre nature influençable et à notre désir d’être acceptés, donc conformes en société. Autre biais : le storytelling. Souvent fondé sur une anecdote n’ayant aucune valeur de preuve, il facilite l’identification et flatte notre besoin de rêver ou de nous illusionner. Le débat opposant Donald Trump à Ben Carson, neurochirurgien et homme politique, en 2016, est un exemple flagrant. Malgré la présence des chiffres et faits scientifiques de Ben Carson démontrant l’inexistence de lien entre vaccination et autisme, l’histoire romancée de Donald Trump, a eu beaucoup plus d’impact ! En prenant conscience de ces biais, nous pourrions limiter les influences des marques qui surfent sur nos peurs, nos désirs et nos frustrations.
>> Découvrez la suite de ce dossier sur le neuromarketing la semaine prochaine sur notre blog, ici, ou en téléchargeant Transat 7 :